De Théodore Roszack
Traduit par Edith Ochs
C'est en fréquentant un cinéma de quartier que Jonathan Gates découvre, par hasard, un film d'un réalisateur inconnu : Max Castle. Si le film n’est qu’une série Z, Jonathan se prend de passion pour le cinéaste et entreprend de lever le voile sur sa vie. Max Castle, né en Allemagne, s’est expatrié en Amérique du nord avant la seconde guerre. Il espérait y poursuivre une carrière prometteuse, malheureusement son travail n’a jamais été reconnu et il fut obligé, pour gagner sa vie, d’accepter des projets de plus en plus minables. Jonathan ne tarde pas à considérer Castle comme un génie du cinéma contemporain, car l’artiste parvient à faire passer des sensations étonnantes de noirceur dans ses films. Bien déterminer à découvrir tous les secrets de Max Castle, Jonathan Gates se lance dans une très longue enquête qui va l’amener à reconsidérer l’origine du cinéma et son impact sur ses contemporains…
J’ai été accroché par ce roman grâce à une petite phrase en quatrième de couverture : « Un grand bonheur en perspective pour ceux qui aiment le cinéma, le mystère et la littérature ». Je me suis senti un poil concerné !
La Conspiration des Ténèbres est un gros pavé de 800 pages. Et autant dire que ces 800 pages sont entièrement dédiées à Max Castle, ce cinéaste maudit inventé pour l’occasion par Théodore Roszack. Le roman du coup ressemble à un pavé monolithique : si l’on accroche pas rapidement à la quête entreprise par Jonathan Gates, on risque de se lasser assez vite.
Heureusement, l’écriture de T. Roszack est vive, et donne une impression de belle érudition dans le domaine de l’histoire du cinéma. C’est une des grandes qualités du roman : on pénètre avec bonheur dans les coulisses du Hollywood des années 40-50. L’auteur développe pas mal d’idées et de connaissances intéressantes qui interpellent. Par exemple j’ai toujours appris, et donc crus, que les inventeurs du cinéma était les Frères Lumières. L’auteur nous présente un certain Louis Aimé Augustin Le Prince (voir sa fiche sur Wikipedia), qui aurait inventé avant tout le monde un système cinématographique. Reste qu’il s’agira de prendre toutes ces connaissances avec des pincettes, puisqu’il est souvent difficile de démêler la vérité de ce que l’auteur à inventé pour l’occasion.
Le roman se décompose en 2 grandes parties assez distinctes : les 500 premières pages sont intégralement consacrées à l’enquête de Gates, puis après un passage à vide, les derniers chapitres sont l’occasion pour T. Roszack de terminer son histoire de manière surprenante.
On pourra, à juste titre, remarquer pas mal de ressemblances avec Da Vinci Code. Sauf que La Conspiration des Ténèbres date de 1991, soit bien des années avant le carton de Dan Brown.
En fait, l’une des faiblesses du roman vient justement son âge. Si en 1991 les principes de manipulation du public via les films étaient encore inconnus du grand public, 20 ans plus tard on ne peut pas se dire réellement surpris de ce qu’on découvre sur le travail de Max Castle. Dommage, la découverte des trucages de Castle s’est émoussée au fil du temps.
Heureusement, la puissance du final rattrape le tout et permet de conserver le plaisir de lecture. L’auteur pousse son idée à fond, même si c’est un poil improbable, on se laisse porter par le fil de l’histoire.
Un mot sur la version française. Commençons par le titre, pas forcément très flatteur. Le titre original, Flicker, est intraduisible et fait référence à un point précis des techniques de Castle. Mais franchement La Conspiration des Ténèbres, ca fait un peu trop série B à mon goût. Ensuite, la couverture. Les éditions du Cherche-midi ne se sont pas bien cassé la tête : une couverture toute noire, avec le titre (je n’y reviens pas) vaguement menacant. Alors que les couvertures originales des différentes éditions avaient au moins le mérite de proposer un visuel. Jugez par vous-même ci-dessous.
La Conspiration des Ténèbres est un bon pavé, qui se mérite mais qui apporte en fin de compte un sacré plaisir de lecture. Franchement recommandé.