par Chuck PalahniukEn 1999, sortait dans les salles un film incroyable :
Fight Club. Lorsque je suis entré dans la salle, rien ne m'avait préparer au spectacle que j'allais voir. Le film était réalisé par
David Fincher (tout juste sorti du succès de Seven) et avait pour têtes d'affiche
Brad Pitt (alors star montante d'Hollywood) et
Edward Norton (idem, mais dans une moindre mesure). Et croyez-moi : jamais je ne pensais être bousculé à ce point. Visuellement, le film fait preuve d'une maestria éclatante servant parfaitement les propos pessimistes et noirs de l'histoire. Plus : jamais je n'avais encore été surpris et étonné à ce point par une intrigue. Bref,
le coup de poing dans la gueule.
J'ai donc entrepris ce week-end la lecture du roman d'origine.
Et mon sentiment est partagé.
Pour en venir au principal, c'est-à-dire "pourquoi mon plaisir n'a-t-il pas été aussi grand que prévu ?", je vous dirais que
le film est l'exacte réplique du roman jusque dans certains petits détails. Et c'est ce qui m'a gêné : je savais tout à l'avance, aucune scène n'était vraiment nouvelle (ou presque). Bref l'effet de surprise n'y était plus (et ceux qui parmi vous ont lu ou vu Fight Club savent à quel point l'élément de surprise est important dans l'histoire). Bref,
j'enrage d'avoir vu le film avant le livre : si j'avais su, j'aurais à tout prix fait l'inverse.
Sinon, hormis ce problème, le livre livre les mêmes impressions que le film : difficile de résumer une intrigue aussi alambiquée. Je vais quand même essayer.
Le personnage principal du roman est un petit employé de bureau, expert en assurances automobiles, la trentaine et célibataire. Malheureusement pour lui, sa vie monotone lui pèse, à un point tel qu'il souffre d'insomnie. Seul façon pour lui de guérir de ce mal : cotoyer des groupes d'entraides style Alcooliques Anonymes. Et contempler la détresse des autres lui permet de retrouver une certaine "paix intérieure"... et dormir.Au détour d'un voyage d'affaire, il rencontre Tyler Durden, un fabricant de savon mi-anarchiste mi-terroriste qui rejette la société de consommation. Les deux hommes se lient d'amitié et créent ensembles le Fight Club où des hommes se battent à mains nues. Une certaine façon de retrouver le sens de la vie, loin de la publicité et des médias...Fight Club est un roman
anti-conformiste et particulièrement acide. Palahniuk critique la
société de consommation (qui ordonne de nouveaux besoins superficiels et inutiles), le développement du "paraître" sur l'"être", et le
besoin d'auto-destruction. Le tout enrobé dans un ton particulièrement noir et avec un style moderne.
Extraits :
"
Sur une échelle remporelle suffisamment longue, le taux de survie de tout un chacun retombe à zéro."
"
Tu as une classe entière de jeunes hommes et femmes forts et solides, et ils veulent donner leur vie pour quelque chose. La publicité les fait tous courir après des voitures et des vêtements dont ils n'ont pas besoin. Ils travaillent dans des métiers qu'ils haïssent, par générations entières, uniquement pour pouvoir acheter ce dont ils n'ont pas vraiment besoin.Nous n'avons pas de grande guerre dans notre génération, ni de grande dépression, mais si, pourtant, nous avons bien une grande guerre de l'esprit. Nous avons une grande révolution contre la culture. La grande dépression, c'est nos existences. Nous avons une grande dépression spirituelle."
"
Nous sommes les enfants de l'histoire, entre aînés et cadets, élevés par la télévision dans la conviction qu'un jour nous serons millionnaires, vedettes de cinéma, stars du rock, mais cela ne se fera pas. Et nous sommes simplement en train d'apprendre ce petit fait , dit Tyler. Alors ne déconnez pas avec nous."
"
Ce n'est qu'après avoir tout perdu, dit Tyler, qu'on est libre de faire ce que l'on veut."
"
Peut-être que l'amélioration de soi n'est pas la réponse. Tyler n'a jamais connu son père.Peut-être que la réponse, c'est l'auto-destruction."
Différences entre le film et le roman :Maintenant pour ceux d'entre-vous qui ont vu le film et qui s'interrogent sur
les différences avec le roman sans vouloir investir (vous avez tord), quelques petits trucs que j'ai relevé ici ou là. Bien entendu, si vous n'avez vu ou lu ni l'un ni l'autre, ne lisez pas (ou bien lisez mais vous ne pigerez pas grand chose).
- La rencontre entre le narrateur et Tyler Durden est complètement différente. Dans le film, ils se rencontrent dans un avion ; dans le roman, c'est sur une plage nudiste.
- Les actions de Tyler en tant que serveur-terroriste sont plus détaillées dans le roman.
- La scène où Tyler se fait tabasser par le patron du sous-sol (dans le film) n'existe pas ici. Il s'agit dans le roman de son patron, chef d'un syndicat de projectionnistes. Idem lorsqu'Edward Norton se fait "tabasser" par son patron de bureau, ici c'est par un restaurateur.
- Dans la scène de l'accident de la route, dans le film, Tyler est présent dans la voiture. Ici non. Mais les complices de Tyler (les Singes de l'espace) offrent un gâteau d'anniversaire au narrateur.
- Les Singes de l'espace réalisent des sacrifices humains, au lieu de simplement provoquer des gens dans la rue.
C'est la fin du film qui diffère le plus du roman :
- le narrateur tente de ne plus dormir avec l'aide de Marla en se bourrant de cachetons.
- Il a une grande discussion avec Marla qui n'existe pas dans le film.
- Les ravages causés par les combats sont bien plus impressionants dans le roman. Le narrateur termine l'histoire avec un trou énorme dans la joue suite à un combat trop violent.
- La toute fin est très différente et bien moins floue. La scène du building n'existe pas. Dans le roman, le narrateur est enfermé dans un hôpital psy. Un infirmier vient le voir pour lui confirmer que le plan est toujours en cours d'éxécution.
Et n'oubliez pas :
la première règle du Fight Club est on ne parle pas du Fight Club...
Edition Folio SFISBN : 2-07-042240-2